Route du Rhum : Communiqué N°3

Route du Rhum : Communiqué N°3

Route du rhumAntoine Koch à bord de Sopra Group : Tirer des bords et des leçons…

Après un début de nuit sous les orages dans des vents très instables les conditions se sont bien améliorées (soleil et enfin du vent…) et Sopra Group tire des bords vers le cap de la Nao, progressant à 18 noeuds avec 22 noeuds de vent sous GV haute et trinquette.
Il se trouvait ce matin à 470 milles de l’arrivée.

 

« Bonjour à tous,

Les conditions de vent très légères du départ ne nous ont pas permis de rester au contact des autres. Dans du tout petit temps au portant, nous avons été décrochés en vitesse pure dès les premières heures de course, alors que nous estimons plutôt avoir fait de bons choix tactiques au départ, notamment en mettant le gennaker plus vite que les autres. Nous avons eu le sentiment dans cette partie de la course d’être appliqués, mais que ça ne suffisait pas. Nous réussissons malgré tout à limiter la casse, avec seulement 30 milles de retard le lendemain matin, alors que nous nous attendions au double… Malheureusement, à cause de ce retard, nous sommes passé dans les anglo-normandes contre le courant, alors que les autres avaient bénéficié du courant portant…ce scénario se répétera à chaque passage à niveau dans la Manche! Pour tenter de revenir, nous tentons quelques options un peu osées dans la manche, et selon le schéma classique des bateaux pas très à l’aise en vitesse pure, nous commettons alors plus d’erreurs de stratégie. Quand nous tirons des bords le long de la côte nord de la Bretagne dans un vent contraire de 5 nds, les autres attaquent la traversée du golfe de Gascogne à 25 nds de moyenne. La traversée du golfe nous réjouit enfin, à plus de 20 nds de moyenne, avec des pointes régulières à plus de 30 nds. et là, enfin, le bateau semble plus dans son élément, il est facile et sain. Malgré tout, bateau chargé, avec 6 personnes à bord et l’avitaillement pour 10 jours, la barre reste dure et le bateau n’accélère pas comme lors des entraînements en double, bateau vide, que nous avons pu faire à port la foret. Au passage du cap Finisterre, nouvelle déception, alors que nous étions revenu à 50 milles de Gitana 12. Ils parviennent à glisser sous la dorsale anticyclonique qui s’étend sur l’Espagne, et ils touchent des vents portants soutenus alors que nous restons bloqués. Ils nous reprennent 200 milles en 24h. Pour le coup, rien à voir avec le potentiel du bateau ou un quelconque choix de route. Nous sommes juste au mauvais endroit au mauvais moment, et la porte se ferme devant nous.

Le problème, c’est que l’Espagne nous réservait encore quelques tours ! piégé dans la baie de Cadix sans vent pendant 24 heures, puis piégé à Gibraltar avec 40 nds de vent, rafales à 45 nds pendant 12 heures, au total, nous aurons parcouru sur la route 200 milles en 48 heures, soit une moyenne de 4 nds, totalement surréaliste pour un trimaran plus habitué au 20 nds…

Et la suite du parcours s’annonce difficile, avec un marais barométrique qui s’installe sur la méditerranée, et devrait rendre les vents très instables et légers pour les prochains jours… la route vers Nice s’annonce donc encore longue et difficile. Nous aurons vraisemblablement du mal à rejoindre la ligne d’arrivée dans les temps.

Leçon numéro 1:
Le bateau ne va pas très vite dans le petit temps. On le savait déjà. Le bateau semble beaucoup souffrir du poids embarqué. on le savait moins. ça laisse espérer que le différentiel de performance soit un peu plus faible en configuration solo pour le Rhum.

Leçon numéro 2:
C’est un peu difficile d’aller à la confrontation avec les autres alors que nous ne disposons pas encore de l’ensemble des évolutions 2006, et notamment du mât et des voiles.

Leçon numéro 3:
Déception parce que nous avons fait évoluer favorablement le bateau, on le sent bien et nous en avons eu la confirmation à Port la Foret lors des entraînements. Seulement pour l’instant ça ne suffit pas.

Leçon numéro 4:
Chaque mille parcouru à bord compte dans la préparation du Rhum

Leçon numéro 5:
L’équipe se comporte super bien et reste concentrée. Tout le monde intègre pleins d’éléments in situ qui permettront d’affiner la préparation technique en vue du Rhum, et notamment la fiabilisation de pleins de petits détails qui facilitent la vie à bord. Ils ont vu ça de l’intérieur et ont compris la nécessité absolue du bon fonctionnement de ces systèmes et la difficulté à les fiabiliser compte tenu de la violence des éléments. (J’imagine que lors d’une traversée du détroit de Gibraltar comme celle-ci, le bateau doit bien vieillir de 10 ans…). Cet élément concernant l’équipe est le plus important de cette course.

Conclusion en forme de poire:
Je n’aime pas beaucoup me retrancher derrière cet argument, mais au-delà du déficit de vitesse du bateau, je crois que nous n’avons pas eu beaucoup de chance, et que la météo n’a pas été très favorable avec nous. Le but du sport de haut niveau est de réduire au maximum la place laissée à la chance. C’est ce que Groupama fait très bien et nous bossons pour réussir à faire la même chose un jour, même si nous n’avons pas encore tous les ingrédients pour.

On prend soin du bateau et on se dépêche d’arriver.

à bientôt,

Antoine. »

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