Isabelle Bianchini

Isabelle Bianchini

C’est comme une obsession. Isabelle Bianchini est fascinée par les supermarchés. Précisons : pour le commerce de masse, qui cible les clients, étudie leurs comportements, à coups de statistiques, de tableaux, de couleurs, d’odeurs… Ces procédés, Isabelle Bianchini les utilise aussi, à sa manière, en les appliquant à son travail, et à son mode d’exposition. N’y voyons pas là une simple application d’une méthode commerciale au travail de l’artiste. Bianchini précise éprouver autant de fascination que de dégoût pour cette machine efficace et trompeuse. Présentoir à tomates pas mûres, Implantation pour papier hygiénique, composition en vague, grand destockage, grand jeu de la clef, sont quelques-uns des titres utilisés par l’artiste. On reconnait là les termes employés pour les stratégies de vente. Ces stratégies, Isabelle Bianchini les récupère, les applique, mais en n’utilisant que les couleurs, le graphisme de présentation des produits et en les sortant de leur contexte. Un exemple : un supermarché réalise des tableaux pour visualiser la disposition des rouleaux de papier hygiénique dans un rayon, en pensant notamment à la répartition de ses couleurs. L’artiste va reproduire l’étude graphique sur des panneaux de bois et seulement cela.

Entre le titre de l’œuvre et les motifs graphiques, on pourra comprendre de quoi il s’agit, ou apprécier simplement le caractère formel du dispositif. Elle rapproche ainsi les méthodes commerciales des grandes surfaces, à certaines techniques d’exposition dans le domaine de l’art. Tout cela ne l’empêche pas de traiter la question à la légère en envoyant, par exemple, en guise de carton d’invitation, un prospectus accompagné d’une clef. Tout y est, le graphisme et les couleurs clinquantes, les termes accrocheurs. Isabelle Bianchini n’offre pas au gagnant un voyage ou un scooter, mais une œuvre d’art. L’idée ou le procédé ne sont pas des nouveautés. Ici se trouve développée une obsession qui l’anime, à l’évidence, profondément. Une des dernières œuvres est, à ce titre, encore plus intéressante. Elle s’intitule Edith et Yves et illustre l’histoire d’une vieille femme solitaire qui reçoit des cadeaux. Cette femme, Isabelle Bianchini la dessine, colorant seulement les objets offerts. Le prénom féminin du titre, se rapporte probablement à la vieille femme qu’on voit. Mais Yves ? On pourra comprendre qu’il s’agit d’Yves Rocher et de ses produits cosmétiques, grâce aux documents publicitaires installés autour du dessin. Tout tourne autour des cadeaux, que l’artiste fait gagner à cette femme, grâce à une carte de fidélité. À partir de là, il y a va et vient entre fiction et réalité. Une sorte de vertige.

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